CHAPITRE III

 

LAMARTINE

(1790-1869)

 

 

            I - Introduction

            II - La mère de LAMARTINE lui enseigna les premières notions de Liturgie, dont il se souviendra en tout temps.

            III - 1) Jocelyn est un être antiliturgique: il veut s'élever à Dieu sans l'entremise du culte. Explication arbitraire de la cérémonie de l'Extrême Onction. Son aversion pour certaines pratiques religieuses et sa critique de CHATEAUBRIAND. Il est l'héritier conscient des tendances du XVIIIème siècle, la raison est son culte. - 2) Les Prières des Agonisants le touchaient. - 3) Il tire de la Liturgie des effets sentimentaux et annonce ainsi la poésie de LOUIS LE CARDONNEL. Description superficielle des offices célébrés au Saint Sépulcre. - 4) La Liturgie constitue un patrimoine national du peuple français. Description d'une Messe rurale. Elle exerce une influence bienfaisante sur tous ceux qui souffrent. L'Office des Morts. L'Angélus. - 5) a) Les allusions aux Psaumes, b) à l'encens et à la Fête Dieu.

            IV - Le nationalisme liturgique de LAMARTINE. Ses meilleurs poèmes sont l'illustration achevée du ps. 18,2: "Coeli enarrant gloriam Dei, et opera manuum ejus annuntiat firmamentum".

 

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            I - Il eût été hasardeux de notre part si nous eussions eu la prétention d'analyser sous l'angle liturgique l'oeuvre immense de LAMARTINE. Nous n'avons pas pris à tâche d'apporter tous les détails possibles parce que  il est facile d'aboutir à la notion exacte de ses conceptions liturgiques après l'étude sérieuse de ses livres les plus caractéristiques. En vertu de ce fait, nous nous sommes intéressés tout particulièrement au Jocelyn (1836) et à Graziella (1852) comme aux Confidences (1849) et aux Nouvelles Confidences (1851).

            Quant au reste de ses oeuvres, nous en citerons quelques passages au fur et à mesure qu'ils rentreront dans notre étude. Il faut se rappeler que LAMARTINE est un poète antiliturgique et qu'il ne faut pas, par conséquent, s'attendre de sa part à de trop nombreuses allusions aux prières officielles de l'Eglise.

 

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            II - Ses connaissances liturgiques n'étaient pas extrêmement vastes. Elevé par sa mère et par les Jésuites, il se rappelait pendant toute sa vie de quelques psaumes et tout particulièrement des Prières des Agonisants. C'est donc tout d'abord à sa mère qu'il devait ses premières connaissances liturgiques:

            "Cela me reportait au souvenir de la maison paternelle, où notre mère nous réunissait aussi, le soir, pour prier ... aux dernières heures du crépuscule..." (Graziella, p.13-14). Cette lecture était suivie de la prière, qu'elle lisait elle-même à haute voix, ou que mes jeunes soeurs à sa place lisaient quand elles furent plus âgées. J'entends d'ici le refrain de ces litanies monotones qui roulaient sourdement sous les poutres. L'un de nous était chargé de dire à son tour une petite prière pour les voyageurs, pour les pauvres, pour les malades, pour quelque besoin particulier du village, de la maison" (Confidences, Edit. Waltz, p.157). Sa mère récitait aux pauvres "les prières du dernier moments" (ibid., p.159)(66) “et les enseignait à Alphonse" (67).

            Les réminiscences des prières apprises dans l'enfance lui resteront pendant toute sa vie. Malgré son esprit individualiste, cet admirateur de ROUSSEAU se souviendra toujours avec une nostalgie attendrissante des heures de prières passées dans la maison paternelle. Non que leurs textes fussent restés dans sa mémoire : c'étaient les charmes poétiques qui s'en étaient détachés qui lui inspiraient une indulgence à leur égard. Pourtant pour gagner une vue suffisamment claire de l'ensemble de ses conaissances liturgiques, force est de diviser notre analyse en plusieurs parties; nous allons donc les considérer sous les cinq aspects suivants:

 

            III - 1) TRAITS GENERAUX DE SES CONVICTIONS                                                          ANTILITURGIQUES

            Après la lecture intelligente de Jocelyn, une chose saute tout d'abord aux yeux. Ce prêtre catholique après avoir éprouvé tous les sentiments que comportent les changements des saisons de la nature, ne mentionne dans son journal intime aucune fête de l'Eglise. Les allégresses de Noël ou de Pâques, ou bien la tristesse du Carême n'a laissé dans son âme aucune trace. Jocelyn, cet admirateur de la nature, est un être antiliturgique jusqu'à la moelle. LAMARTINE y a projeté son âme à lui. Ce prêtre - il faut appuyer sur ce mot - veut s'élever à Dieu sans l'entremise du culte.(ROUSSEAU)

            " Et que l'air m'aiderait comme il aide les aigles,

   A m'élever à Dieu, mieux que ces froides règles" (p.58).

 

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            S'il est tenu par suite de son ministère de prêtre à s'astreindre à des cérémonies, il les interprète à sa manière en s'éloignant de beaucoup de leur signification véritable. Il décrit ainsi l'Extrême Onction qu'il donnait à sa mère:

" Du Chrême des mourants je touchai chaque membre,

Ce front où mes baisers voulaient suivre mes doigts

Ces flancs qui sur son coeur m'avaient couvé neuf mois,

Ces bras qui m'entouraient tout petit de tendresse,

M'avaient fait tant de fois un berceau de caresses;

Ces pieds, qui les premiers frayèrent mon chemin,

Dont toute trace allait disparaître demain" (p.100-101).

 

            “Il ne pensait pas le moins du monde à toutes les fautes qu'elle a commises par la vue ... par l'ouïe... par l'odorat ...par le goût et par la parole ... par le toucher  ... par les pas et la démarche"(Rituel pour tous, p.96). - Les descriptions d'un sujet pareil que nous trouvons chez FLAUBERT et chez BAUMANN correspondent bien davantage à la réalité existante.

            Certains passages des Nouvelles confidences ( p.156-157 ) prouvent toutefois que l'aversion à l'égard de la Liturgie a atteint chez LAMARTINE un degré trop élevé pour que nous puissions la passer sous silence.

            "On sait ce qu'était alors la vie de ces couvents: des cérémonies religieuses plus propres à fanatiser les sens qu'à édifier les âmes, des parfums, des tableaux, des fleurs, des musiques dans la chapelle ... des processions, des rosaires sans fin et sans idées, des pratiques enfantines, des coutumes austères, des recueillements extérieurs, des méditations marquées au cadran à différentes heures du jour..."

            Aussi reproche - t - il à CHATEAUBRIAND d'une manière certainement exagérée son enthousiasme pour les livres liturgiques et pour les cérémonies populaires:

            " ... CHATEAUBRIAND avait fait dans son livre comme Ovide, les Fastes de la religion. Il avait exhumé, non le Génie, mais la mythologie et le cérémoniel du christianisme... Il avait fait le poème de toutes les vétustés    populaires, et de toutes les institutions déchues; depuis .... les observations de l'ascétisme monacal, jusqu'à ses ignorances béatifiées, et jusqu'aux fraudes pieuses des prodiges populaires inventés par le zèle et perpétués par la routine du clergé rural pour séduire l'imagination ... Son livre est un reliquaire de la crédulité humaine"(p.286-287).

            LAMARTINE a souvent exprimé ce rationalisme en matière de Liturgie. Il n'admet pas qu'un art seul, ou bien les arts pris dans leur ensemble - comme c'est le cas dans la Liturgie -puissent réfléchir le monde visible ou le monde moral:

" La voix de l'univers c'est mon intelligence

  Et mon âme à son tour réfléchit l'univers." (Méditations poétiques, p.50-51)

 

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            C'est dans la Chute d'un Ange qu'il déclare tout franchement: il n'a pas besoin d'un interprète auprès de Dieu parce que "la raison est le culte et l'autel est le monde" (WALTZ, p.104).

            LAMARTINE nous paraît donc au point de vue liturgique l'héritier prononcé des tendances du XVIIIème siècle.

 

2) LES RITES DE L'EXTREME ONCTION ET LES PRIERES DES AGONISANTS etc...

 

            Malgré son rationalisme liturgique, le grand poète lyrique n'a pu se soustraire complètement à l'empire de certains offices. Les prières pour les morts le touchaient tout particulièrement. C'est de sa mère qu'il a appris à les aimer :

"J'essayais de chanter dans un saignant effort

Quelques notes des chants consacrés à la mort;

Et ma voix chaque fois, dans mon sein repoussée,

Se brisait en tronquant l'antienne commencée;

Et mes pleurs dans mes chants ravalés à grands flots,

Sortant avec mes cris, les changeaient en sanglots" (Jocelyn, p.209).

"O chant de paix de morts que démentait mon âme,

Choeur funèbre chanté pendant l'horreur du drame!

Ah, vous n'êtes jamais sorti des voix d'un choeur,

En faisant éclater plus de fibres du Choeur” (ibid., p.208).

            Ou bien :

"J'allumais ces flambeaux de la dernière nuit,

Double image du jour qui commence et qui fuit,

Dans le vase caché de l'humble Eucharistie

Des mourants à sa voix j'allai puiser l'hostie,

Et penché sur son front de ma tremblante main,

Tout mouillé de mes pleurs, je lui rompis le pain;

Du Chrême des mourants, je touchai chaque membre" (ibid., p.100-101). (a)

 

3) LAMARTINE EN TIRE DES EFFETS POETIQUES

            Si rares que soient les allusions liturgiques dans ses oeuvres, il s'en sert exclusivement pour en tirer (comme c'était d'ailleurs selon la formule des Romantiques) des effets poétiques. Les exemples cités jusqu'à présent l'ont déjà quelque peu démontré. Nous allons y ajouter encore quelques extraits plus frappants :

            "Le soir quand les dernières lueurs du soleil s'éteignirent sur les fenêtres de la chambre haute du pauvre peintre, et que les cloches des monastères voisins sonnaient l'Ave Maria, cet adieu harmonieux du jour en Italie, le seul

 

(a) V. la suite un peu plus haut. V.e.p.26,128 et 140).

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déclassement de la famille était de dire ensemble le chapelet et de psalmodier à demi-chant les litanies jusqu'à ce que les voix affaissées par le sommeil s'éteignirent dans un vague et monotone murmure semblable à celui du flot qui s'apaise sur une plage où le vent tombe avec la nuit........ J'aimais cette scène calme et pieuse du soir où finissait une journée de travail par cet hymne de trois âmes s'élevant au ciel pour se reposer du jour" (Graziella, p.13-14).

            LAMARTINE ne tire pas de la Liturgie des effets d'horreur comme VICTOR HUGO et n'y trouve qu'une nourriture pour la sentimentalité de son âme. Il s'y annonce comme précurseur de LOUIS LE CARDONNEL. Les vers suivants ne nous rappellent-ils pas la manière du poète des "Carmina sacra"?

 

"Les saints flambeaux jetaient une dernière flambe

Le prêtre murmurait ces deux chants de la mort,

Pareils aux chants plaintifs que murmure une femme

A l'enfant qui s'endort" (Le Sacrifice).

            Ou bien :

"Je n'aime des longs jours que l'heure des ténèbres,

Je n'écoute des chants que ces strophes funèbres

Que sanglote le prêtre en menant un cercueil" (La Vigne et la Maison).

 

            Voyons encore les impressions qu'éprouvent LAMARTINE à la vue du Saint Sépulchre. Il ne rapporte rien de la signification liturgique des offices concentrés autour de cet endroit. Il ne remarque que ce qui est à même de toucher ses sentiments: son inspiration poétique reste exactement la même que s'il avait assisté au spectacle attendrissant de la nature:

            "Ces impressions ne s'écrivent point, elles s'exhalent avec la fumée des lampes pieuses, avec les parfums des encensoirs, avec le murmure vague et confus des soupirs" (Voyage en Orient, WALTZ, p.419).

            PIERRE LOTI, adversaire prononcé de la Liturgie, qui a décrit dans Jérusalem le même sujet, a été moins superficiel dans ses observations. Non seulement il a pris la peine de s'informer de la qualité des divers offices qu'on y célébrait, mais aussi les nous a-t-il présentés avec de nombreux détails.

 

4) LA LITURGIE CONSTITUE UN PATRIMOINE NATIONAL

    DE LA FRANCE

            Les descriptions de diverses cérémonies religieuses quoique courtes se rencontrent éparpillées de temps à autre dans les oeuvres de LAMARTINE. En dehors de l'Extrême Onction pour laquelle il conservait une sympathie depuis son enfance, on trouve chez lui des descriptions des Messes, de la prière de l'Angélus et de quelques autres cérémonies.

 

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            Il en dégage tout ce qu'elles recèlent de poésie immanente sans s'arrêter à leurs significations symboliques ou à l'explication de leurs textes. Ceci nous prouvera à nouveau que la Liturgie constitue un patrimoine national au point de forcer l'attention de ses adversaires eux-mêmes. Voici la description d'une Messe rurale :

 

"Je convoque à l'autel les maisons d'alentour,

Des vieillards, des enfants, quelques pieuses femmes,

Ceux qui sentent de Dieu plus de soif dans leurs âmes

D'un cercle rétréci m'entourent à genoux.

Le Dieu des humbles gens descend du ciel sur nous.

Combien la sainte aurore et ses voûtes divines

Entendent de soupirs s'échapper des poitrines

Et d'aspirations de terre s'élancer" (Jocelyn, p.719).

 

            LAMARTINE constate donc que la Liturgie exerce une influence bienfaisante sur le peuple français: elle l'accompagne pendant toute sa vie parce qu'elle sait répondre à tous les besoins de son âme.(a)

           

            C'est ainsi qu'un pauvre homme dont la femme vient de mourir trouve dans l'Office des Morts l' expression adéquate qui correspond aux souffrances de son âme:

 

"Je célébrai du jour le solennel service;

Des morts dans le Seigneur, seul je chantai l'office,

Et la voix de l'épouse du seuil du saint enclos

Aux psaumes de la mort répondait en sanglots" (Jocelyn, p.335).

           

            Aussi, la Liturgie éveille-t-elle à chaque pas la poésie latente dans le coeur des Français :

"C'est l'Angélus qui tinte et rappelle en tout lieu

Que le matin des jours et le soir sont à Dieu

A ce pieux appel, le laboureur s'arrête;

Il se tourne au clocher, il découvre sa tête.

Joint ses robustes mains d'où tombe l'aiguillon,

Elève un peu son âme au-dessus du sillon,

Tandis que les enfants, à genoux sur la terre,

Joignant leurs petits doigts dans les mains de leur mère" (Jocelyn, p.168).

 

            A la lecture de ces vers charmants, n'éprouvons-nous pas les mêmes effets poétiques qu'à la vue des tableaux de MILLET ?

 

(a) Pendant son séjour en Italie, LAMARTINE s'était persuadé de l'importance que les Italiens attachaient aux cérémonies religieuses. "C'est ainsi que les jours de fête, je la menais le matin et le soir aux églises, seul et pieux divertissement qu'elle connût et qu'elle aimât" (Graziella, p.79, V.e., p.143-163).

 

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5) LES TRACES DE LA LITURGIE DANS LE STYLE DE LAMARTINE

 

            Comme nous l'avons fait en parlant des écrivains divers, force nous est de signaler les traces que la Liturgie a laissé dans le style de notre écrivain. Nous trouvons donc chez lui plusieurs espèces d'allusions, les unes se rapportant aux textes sacrés (Psaumes et Hymnes) tandis que le reste nous rappelle certaines cérémonies religieuses:

a) les allusions aux Psaumes sont manifestes dans les vers suivants :

"Puis comme un coeur brisé dans le sein qu'un mot touchant ranime

Et criant vers le ciel du fond de mon abîme" (Jocelyn, p.147).

            Ou encore :

"Je m'abrite muet dans le sein du Seigneur" (ibid., p.71) (a)

 

b) les allusions à l'encens qui abondent dans l'oeuvre de BAUDELAIRE se rencontrent déjà très nombreuses chez LAMARTINE :

"Le prêtre est l'urne sainte .....

où l'herbe odorante ou l'encens de l'aurore

Au feu du sacrifice en tout temps s'évapore" (Jocelyn, p.48).

            Ou bien :

Heureux qui...

... consumé d'amour et de reconnaissance

Brûle comme l'encens son âme en sa présence!" (Dieu dans les Méditations poétiques. (b)

            C'est ensuite  la Fête-Dieu qui lui a inspiré les versets suivants:

"Préparons lui des lèvres pures

Un oeil chaste, un front sans souillure

Comme aux approches du saint lieu,

Des enfants, des vierges voilées

Jonchent de roses effeuillées

La route où va passer un Dieu" (Esprit de Dieu, p.35-40).

(c)       Les expressions liturgiques pour désigner un état d'âme déterminé ne sont pas très rares chez lui: "Notre vie était entre les mains de cette femme un sursum corda perpétuel" (Confidences, WALTZ, p.156).

            "Tout se levait de nouveau, tout rayonnait, tout murmurait, tout chantait en moi ce chant de résurrection, comme Alleluia trompeur qu'entend Marguerite à l'église le jour de Pâques dans la Faust de GOETHE.

 

(a) Comparez encore les vers 72 et 139 de l'Hymne du Matin, aux vers 2 et 26 du Psaume 96 et les préludes V.139; "Esprit Consolateur, que ta voix est changée" au Veni Creator

(b) V.e. Hymne du Matin, v.19-20

(c) V.e., l'Immortalité, p.107-110

 

 

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            Mon âme n'était qu'un cantique d'illusions" (Préface aux Harmonies poétiques et religieuses).

            Plus tard, HUYSMANS parlera de la "Toussaint d'âme" et rappellera à notre mémoire les vers de LAMARTINE.

 

            IV - Nous l'avons bien vu, l'auteur de Jocelyn est foncièrement antiliturgique. Les nombreuses citations que nous venons d'apporter ne changent rien à notre affirmation. Héritier des conceptions religieuses de ROUSSEAU, LAMARTINE ne voulait d'autre culte que celui de la raison, d'autres sanctuaires que celui de la nature:

"Voilà le sacrifice immense, universel,

l'univers est le temple, et la terre est l'autel,

les cieux en sont le dôme, et les astres sans nombre,

Ces feux demi-voilés, pâle ornement de l'ombre,

Dans la voûte d'azur avec ordre semés

Sont les sacrés flambeaux pour ce temple,

Et ces nuages purs qu'un jour mourant colore,

Et qu'un souffle léger, du couchant à l'aurore,

Dans les plaines de l'air repliant mollement

Roule en flocons de pourpre aux bords du firmament,

Sont les flots de l'encens qui monte et s'évapore

Jusqu'au trône du Dieu que la nature adore" (La prière, p.15-51).

 

            PAUL CLAUDEL qui voit aussi dans les évolutions de l'Univers un acte liturgique d'une beauté incomparable, n'est pas pourtant un exclusiviste déclaré comme LAMARTINE. Le culte de l'homme rendu à Dieu au moyen de tous les arts connus ne paraît pas être à l'auteur de la Connaissance de l'Est en contradiction avec le grandiose spectacle de la nature, comme à son devancier célèbre. Les plus beaux endroits de l'oeuvre d'Alphonse de LAMARTINE sont malgré leur attitude antiliturgiques. L'illustration la plus belle et la plus enthousiaste du verset liturgique est:

"Coeli enarrant gloriam Dei,

et opera manum ejus annuntiat firmamentum" (ps. 18,2).