LA SAINTETE DE LA VIE

Un homme neuf à Zagreb

 

Après avoir terminé ses études littéraires à Paris, Ivan retourne dans sa patrie durant l’été 1922. Dès l’automne de la même année il obtient un poste de professeur de langues française et allemande au lycée de l’Archevêché à Zagreb. Ce sera son emploi jusqu’à la fin de sa vie terrestre. L’année suivante il obtient un doctorat à la faculté de philosophie de l’Université de Zagreb grâce à une thèse ayant pour thème l’influence de la liturgie sur les écrivains français. Il habite avec ses parents dans ce qui était alors le foyer de Starcevic, près de la gare - aujourd’hui 6, place de Starcevic, 2ème étage.

       Ivan ne vit que six ans à Zagreb. Pendant cette courte durée, il va tracer un profond sillon dans le champs du catholicisme croate. Tel un météore, il va resplendir dans le ciel de l’Eglise en Croatie et y briller pour beaucoup comme une étoile guide, en particulier pour la jeunesse croate.

       Ivan revient de Paris en étant clairement conscient que “la foi catholique est sa vocation”, comme il l’a écrit à sa mère avant son retour. Il arrive sachant ce qu’il veut, avec tout un programme spirituel. Le professeur Marica Stankovic, sa collègue dans son travail éducatif, l’a sans doute exprimé de la façon la plus exacte : “C’est un homme neuf qui apparaissait à notre horizon. Arrivait un homme pour qui la foi ne correspondait pas à une tradition mais à sa vie, il ne considérait pas son engagement catholique comme un sport mais comme un combat pour les âmes immortelles.”

       Ivan consacre tout son temps libre à l’éducation de la jeunesse croate au  sein des organisations catholiques de l'époque, plus particulièrement  dans la Fédération croate “Orlovi” (les Aigles).

       Ivan Merz devînt un guide idéologique pour une grande partie de la jeunesse catholique et instaura une nouvelle forme de pensée, de sensation et de raisonnement dans la vie publique catholique croate.

       Ce qui est particulier chez Merz, et qui nous attire et enthousiasme, c’est d’abord la beauté de son âme remplie de Dieu. Dusan Zanko dit de lui qu’il est devenu le “symbole de la stabilité d’orientation spirituelle et la borne du catholicisme croate”. C’est avec une toute nouvelle ardeur et une conscience pleine d’expériences en tant que laïc qu’il démontre la beauté des vérités chrétiennes, la grandeur de l’Eglise en tant que mysticité du corps du Christ, l’importance de la doctrine de l’Eglise pour la vie de chaque catholique, l’importance de la liturgie pour la vie privée spirituelle, l’importance de la Papauté pour les catholiques et les peuples; il insistait sur la nécessité pour les laïcs de s’engager dans l’apostolat de l’Eglise, mais toujours en collaboration et sous la coupe de la hiérarchie écclésiastique; il s’engageait contre la politisation des organisations catholiques en s’efforçant de faire en sorte qu’elles  favorisent en premier lieu le bien spirituel surnaturel de leurs membres. “Il a peut-être été le seul d’entre nous qui, de tout ce qu’il a écrit, n’a rien écrit qui ne soit dans le saint enthousiasme et dans la protection resplendissante de l’inexplicable Grâce. C’était sa force, et cela l’est encore aujourd’hui. C’est  pour cette raison qu’il avait de l’influence sur la jeunesse et qu’il en a fait justement les défensseurs de Dieu.”  C’est en ces termes que le poête croate, Ton Smerdel écrira sur Ivan. 

 

Ivan  prie

       La grandeur d’un homme se manifeste en premier lieu dans son comportement envers Dieu, et ce comportement se réalise avant tout à travers la prière. Dans le journal intime d’Ivan on remarque, dès le début, sa propension à la prière. Il note des invocations et des prières parfois courtes, parfois longues, très belles, touchantes, substantielles.

       Cette vie de prière, stimulée par cette invisible Grâce, va se développer avec le temps.

       La caractéristique principale de la vie de prière d’Ivan est ce lien étroit avec la liturgie, prière officiel de l’Eglise. Dans sa vie de prière on ne remarque aucun élément particulier qui ne soit conforme à la recommandation ou à la pratique de l’Eglise. Son centre de rencontre avec Dieu est la messe journalière et la communion dans la Basilique du Sacré-Cœur à Zagreb. Tous les jours, il pratiquait trois quarts d’heure de méditation, comme il l’a noté lui-même. Il estimait nécessaire une méditation liturgique des textes de la sainte messe du jour. Ses amis le trouvent souvent dans son appartement en train de prier avec son bréviaire.

       Son chapelet était tous les jours dans ses mains. Il l’apprécia, plus encore, après sa visite à Lourdes. Il dit lui-même qu’à partir de ce moment là le chapelet est devenu pour lui son second meilleur ami. Le premier étant l’Eucharistie. Ce qu’il trouvait au chapelet, on le découvre à travers un conseil qu’il donna à une jeune fille : “Quand Vous trouverez la vie dure et que des malheurs s’abatront sur Vous, prenez le chapelet de la Vierge et elle Vous consolera et Vous donnera la force de tout supporter avec calme dans un abandon total à la volonté de Dieu”.

       L’adoration devant le Très-Saint Sacrement était pour lui une dévotion particulièrement chère. Tant de gens étaient stimulés à un plus profond respect de l’Eucharistie lorsqu’ils voyaient Ivan, devant le Très-Saint, faire, avec beaucoup de déférence à genoux, un profond recueillement respectueux devant le Tabernacle. Un ami d’Ivan le décrit ainsi : “Lorsque l’on se trouvait dans l’Eglise avec Merz, en le regardant, on sentait vraiment la présence de Dieu. Car il s’agenouillait avec tant d’humilité, de respect et de cœur, qu’il appelait la présence de la sainteté, de la pureté, de la justice, de l’infinie Divinité, devant laquelle on doit tomber à genoux et lui donner toute son âme comme il l’a fait lui-même.”

 

La liturgie – une beauté magique

       Le vaste domaine d’intérêt d’Ivan, son grand et saint “hobby” était la liturgie. Pour lui c’est le lieu où il rencontre le plus profondément Dieu est le monde surnaturel de la foi; c’est le sommet de la création artistique, l’endroit où collaborent tous les arts, la liturgie, en elle même, est,  pour lui, l’art et la vie.

       Après avoir fait une retraite à Vienne pour Pâques de l’année 1920, Ivan commence particulièrement à s’intéresser à la liturgie. A Paris son intérêt pour la liturgie augmente. C’est avec plaisir qu’il se rend à la chapelle des sœurs bénédictines, endroit connu comme étant le centre de rencontre des cercles intellectuels. L’influence de la liturgie sur les écrivains français sera le thème qu’il choisira pour la dissertation pour son doctorat.

       De retour à Zagreb, il écrit de nombreux articles sur la liturgie dans des revues catholiques, il donne des cours de liturgie, il fait en sorte d’informer les jeunes du mieux qu’il peut sur la liturgie, pour qu’ils prient de façon liturgique, pour qu’ils comprennent ce que le prêtre prie devant l’autel (à cette époque la messe est dite en latin).

       Quelques extraits de ses articles nous illustreront mieux l’importance qu’avait pour Ivan la liturgie.

       “La liturgie est la prière officiel de l’église, la prière officiel de la Fiancée du Christ, un dialogue entre la Fiancée et le Fiancé Divin…Que se passe-t-il alors lorsque nous écoutons la discution entre le Christ-Dieu et l’Eglise à son image ? Est-ce que tout ce monde idéologique est pour nous sans objet, et qu’il n’élève pas nos vies jusqu’aux cieux immenses de la vie divine… Selon la réflexion liturgique tous catholique devient grand et universel. Il laisse de côté ses intérêts personnels et commence à avoir les mêmes sentiments que l’Eglise, se reflet grandiose du Christ. C’est sur le fondement de la liturgie que toute âme s’éduque. On peut dire que la liturgie est une pédagogie au sens propre du terme, car, grâce à elle, un croyant peut vivre toutes les phases de la vie éternel du Christ.” (de la revue “Le renouveau de l’âme selon la liturgie”).

       Dans une deuxième revue, “La liturgie et l’art”, Ivan , plein d’enthousiasme, s’exprime ainsi : “La beauté des cérémonies catholiques est tellement merveilleuse, que l’homme qui une fois en a ressenti la  magie, sent, en son âme, le désir ardant de tout abandonner et de passer le reste de sa vie dans les prières liturgiques, chantant jour et nuit, sans arrêt, des louanges à la Très-Sainte-Trinité.”

       Son œuvre sur la liturgie est tellement vaste qu’elle est devenue un sujet de dissertation pour doctorat. C’est le docteur Marin Skarica, prêtre de l’Archevêché de Split, qui l’entrepris à Rome en 1975, à l’institut liturgique Anselmianum du Pape, en l’intitulant “Ivan Merz, promotteur du renouveau liturgique en croatie.”   

      

L’Eucharistie – source de vie

       On remarque chez Ivan, et ce depuis qu’il a commencé à écrire son journal intime, une attirance envers le sacrement de l’Eucharistie. C’est sans septicisme et sans discution qu’il accueil la foi de l’Eglise de la présence réelle du Christ dans l’Eucharistie. Plus il viellit, plus grandit en lui l’amour envers l’Eucharistie. Il notera même quelque part dans son journal :”La communion est source de la vie !”.

       Arrivé à Zagreb, Ivan assiste tous les jours à la messe et reçoit la sainte Communion. Après un discour, qu’il prononce lors d’un grand rassemblement de jeunesse à Maribor en 1920, il dira : “J’ai parlé avec l’ardeur que m’a transmis la très sainte Eucharistie”. Cette ardeur eucharistique était l’inspiration de tout son apostolat. Elle était aussi présente dans la devise qu’il a donné à l’association “Orlovi” (les Aigles), devise qui fut reprise par  “Krizarstvo” (Croisade Eucharistique) : “Sacrifice – Eucharistie – Apostolat”. Trois mots qui sont aujourd’hui gravés sur sa tombe.

       Beaucoup des écrits d’Ivan sont pénétrés de l’Eucharistie et de son esprit. Telles des perles semées de part son immense héritage spirituel. En voici quelques unes :

       “Nous vivons une époque heureuse… nous pouvons être souvent et quotidiennement avec celui qui est toute notre joie… la Sainte Communion  élève et fait renaître notre vie intérieure de la manière la plus facile et la plus rapide. Par la Communion l’âme fête son triomphe, elle devient pareille à son Fiancé Divin, elle devient divine… Par la Communion nous devenons des acteurs de la vie infinie de la Parole Divine. Le moment durant lequel votre corps s’uni avec le Divin doit être l’apogée de votre vie ; cet instant est l’apogée de toute la liturgie.

       Sans la très sainte Eucharistie le corps ne peut devenir assez humble pour l’âme; toute éducation physique qui n’est pas eucharistique est incomplète. Sans l’Eucharistie on ne peut pas vraiment éduquer notre pure génération, et l’éducation de la jeunesse, qui ne va pas dans ce sens, échouera quant à son but.”

       On peut conclure cette courte incursion dans la vie eucharistique d’Ivan en citant quelques mots de son guide spirituel le père Vrbanek :

       “Le fait est  que pour Ivan l’Hostie est le centre de tout : et des règles quotidiennes et des bases de la vie; et de son organisation  “Orlovi” et du thème d’un roman; et de la vie liturgique intérieure et des célébrations extérieures de l’Eglise. Où qu’Ivan soit il y aura aussi quelque chose d’eucharistique; et durant les cinq dernières années de la vie d’Ivan ce fut le contraire : où qu’il y est quelque chose d’eucharistique grandiose, Ivan était présent dans toute sa splendeur.”

 

L’ascension vers la perfection chrétienne

       A la lecture des premières pages de son journal on peut se rendre compte qu’Ivan découvre que “la vie n’est pas une réjouissance mais un sacrifice à tel point qu’elle ne doit même pas regarder  tout ce qui  est beau”. En plus de cet avis, on remarque chez lui, une grande aspiration à mener une vie morale. Les personnes ayant du caractère lui font bonne impression. Plus sa vie spirituelle intérieure s’épanouissait, plus il prétendait vers la sainteté chrétienne. Il s’applique sérieusement à la construction de sa vie spirituelle. Déjà durant les jours de guerre il mènera une vie ascétique, qui sera encore plus remarquable lorsqu’il sera étudiant, et plus tard – à Zagreb, où il mènera une vie pénitentielle. Il maîtrise chacune de ses passions et de ses instincts, il domine tous ses mauvais penchants, souvent il se prive volontairement des plaisirs de la table.

       Lorsqu’il était étudiant à Paris, il s’est élaboré des “règles de vie”. Il s’agit de décisions concernant sa vie spirituelle et ascétique. En voici seulement quelques unes : “Dormir sur une couche bien dure. Sentir la faim le vendredi. Offrir aux pauvres le surplus de ses biens. Prier Dieu pleinement au moins une fois chaque jours. Aller vers les situations désagréables. Recevoir avec joie l’abaissement devant les autres. Ne s’adonner jamais aux sciences trop unilatéralement. Etre en contact le plus étroitement possible avec la vie.”

       Lorsqu’on  lui demandera ce que représentait pour lui la vie spirituelle il répondit : “La vie spirituelle est une méditation des choses divines spirituelles, une participation à la vie intérieure de Dieu… Sans la vie spirituelle je cesserai d’exister. Sans elle c’est l’enfer.” 

 

       Régulièrement, depuis qu’il était étudiant, Ivan à fait des retraites annuelles, lesquelles représentaient pour lui un temps précieux de rencontre avec Dieu et un renouvellement de sa vie spirituelle. Durant chaque retraite Ivan prend des décisions qui ont contribué à son ascension vers la sainteté chrétienne, à sa domination de ses mauvaises inclinaisons et imperfections. Même lorsqu’il est hospitalisé pour subir une opération qui l’entraînera vers la mort, on trouvera dans son missel une feuille de papier sur laquelle il  a écrit ses decisions prisent lors de sa dernière retraite. Nous pouvons y lire : “Comme pénitence faire plus parfaitement ses devoirs professionnels. Ce communier chaque jour… A chaque repas faire une pénitence pour le salut des âmes. Rendre son apparence des plus convenable. Ne jamais critiquer la nourriture. Pratiquer scrupuleusement ses devoirs professionnels en le considérant comme la croix de ma vie, pour ma cruxification quotidienne qui apportera bénédiction à l’Action Catholique dans l’action pour le salut des âmes. Sans arrêt, continuellement inciter en soit les actes de l’amour envers le bon Dieu, envers le Sauveur…”.

       On a réussit à garder ses précieuses notes rédigées lors de ses retraites, lesquelles mettent en évidence la façon dont il va marcher à pas de géant vers la sainteté chrétienne. Jusqu’en 1923 Ivan hésite : faut-il ou non rester dans le monde comme un laïc ? Cette année également, après une retraite tenue chez les jésuites à Zagreb, il a clairement discerné qu’il doit rester dans le monde comme croyant laïc en travaillant dans des associations catholiques. La même année, pour la fête de l’Immaculé Conception, Ivan fait le vœux de chasteté pour toujours; par ce voeux il se consacre totalement à Dieu et à travers cela il s’offre à son prochain en travaillant pour le salut éternel.       

       Dans sa vie spirituelle Ivan ne marche pas seul. Il se confie à la conduite d’un bon directeur spirituel, comme il est conseillé à chaque personne qui souhaite sérieusement progresser dans le domaine spirituel. Pour Paris il s’agit du Père Pressoir, et à Zagreb, comme confesseur et guide spirituel, il choisit le père Josip Vrbanek, jésuite, qui écrivit en 1943, après la mort d’Ivan, sa biographie, ayant en vue, déjà à cette époque, la béatification d’Ivan.

 

Avec Marie vers Jésus

       A la lecture de son journal nous nous apercevons que la Bienheureuse Vierge Marie

a joué un rôle primordiale dans la vie d’Ivan. C’est envers Elle qu’Ivan destine ses touchantes et véritables prières et invocations pour qu’Elle le garde, le protège, qu’Elle l’aide dans sa vie, qu’Elle le préserve du malheur moral et qu’Elle lui sauvegarde la pureté de son âme. Progressivement l’idéal de la femme Ivan le trouvera totalement réalisé en Marie. C’est en Elle qu’il trouve le centre de tout ce qui est sublime.

       Dès sa dix-neuvième année Ivan fait le vœux de chasteté jusqu’au mariage. A ce propos nous trouvons noté dans son journal en date du 12 décembre 1915 : “Il y a quelques jours j’ai fait vœux de chasteté à la Bienheureuse Vierge, jusqu’au mariage. Peut-être que ce vœux durera jusqu’à ma mort.” Cet acte a eut lieu le 8 décembre à l’occasion de la fête de l’Immaculée Conception. Ivan ne s’est pas tompé dans son pressentiment. Huits ans plus tard, également pour la fête de l’Immaculée Conception, il fait vœux de “chasteté éternelle” consacrant par cette décision tout son être à l’amour Divin, au travers duquel, il se donnera totalement, aux frères et aux sœurs dans la foi.

       Sa dévotion en la Bienheureuse Vierge Marie est en liaison la plus étroite avec Notre-Dame de Lourdes. C’est durant ses études à Paris qu’Ivan se rendra pour la première fois en pèlerinage à Lourdes. Ce pèlerinage va provoquer chez lui une profonde impression,  devenant ainsi, pour Ivan, un des moments des plus importants qui l’auront totalement affermi en la vérité de la foi catholique. Depuis lors, comme il l’a écrit, “toute sa vie va se mouvoir autour du Seigneur-Christ”. Que signifiait Lourdes pour Ivan, nous pouvons le deviner en parcourant une lettre qu’il écrit à son ami l’ingénieur Marosevic, en 192O. Cette lettre nous montre, en outre, qu’Ivan était également traversé par une période de doute dans sa progression dans la foi :

       “Oui c’est à Lourdes que j’ai appri ce qu’est le chapelet et il est dès lors devenu mon meilleur deuxième ami. Franchement, j’avoue qu’avant Lourdes subsitait au fond de mon âme un doute, un sentiment : ne  prie-ai-je pas un fantôme de mon imagination ?! Je l’ai priée, bien-sûr, car si je l’arrêtais, cela aurait signifié de ne pas croire en la Bienheureuse Vierge Marie. Et puis, où aller ? Si je me détourne du catholicisme tout autour deviendrait sombre et laid. Donc, Lourdes a ajouté à ma foi rationnelle une dimension sentimentale.”

 

       Arrivant à Zagreb, Ivan deviendra un grand défenseur de Lourdes et propagateur de la piété envers Notre-Dame de Lourdes. Il écrira de nombreux articles sur Lourdes, et, à ce sujet consacrera une brochure. Lourdes est également le thème de beaucoup de ses sujets de cours, accompagnés de diapositifs, qu’il tient en divers endroits de Croatie. En de vibrantes paroles il décrira les visibles manifestations de la foi qu’il vécu à Lourdes :

       “A Lourdes tu es d’abord envahit par le sentiment qu’Elle est là, Elle - la Mère de Dieu qui est la plus grande, et plus puissante, et plus belle que tous ces géants pyrénéens entourant Lourdes… Donc elle est devant toi – c’est un sentiment réel, tu ne peux pas t’en défaire – et mille croyants, durant la nuit, chacun, une bougie d’allumée entre ses mains, montent la colline en chantant sans arrêt, Avé, Avé, Avé Maria. Chaque bougie scintillante est une âme qui partira aujourd’hui, demain ou dans quelques années vers Elle. Oh,  viendra-t-il vite cet instant ? – on le pense, car vraiment, là-bas, on sent un avant goût du Ciel…Oh, quel conte magique, conte des églises illuminées, des lacs et des rivières enflamés, des chansons enthousiasmées, des guérisons miraculeuses et des gens saints qui, par amour envers le prochain, sacrifient leur vie - scène fabuleuse que le Père céleste prépare à ses enfants terrestres.”

      

Pionnier des études théologiques pour les laïcs

       Ivan ne se contenta pas de pratiquer sa vie spirituelle en se servant seulement de ce que l’Eglise à cette époque mettait à sa disposition. Son âme prétend, le mieux  possible,  à une connaissance et un approfondissement intellectuels des vérités de la foi. A notre connaissance, jusqu’à ce jour, Ivan est le premier laïc (en Croatie) qui a systématiquement étudié en privé la philosophie et théologie chrétienne. Après l’obtention d’un doctorat dans sa profession, il commença, en compagnie de son collègue le dr. Drago Cepulic, chez les pères jésuites  à Zagreb, à la Basilique du Sacré-Cœur, en 1923, l’étude de la philosophie sous la conduite du père Alfirevic. Cette étude va durer deux ans. Ces cours terminés, Ivan poursuivra en autodidacte son instruction de théologie en se servant de manuel. Parralèllement à ses études de philosophies, Ivan analysera les encycliques papales et toutes les importantes déclarations des papes en commençant par Léon XIII, Pie X, Bénedicte XV, jusqu’au pape de l’époque Pie XI, souhaitant ainsi contribuer pour le mieux à la doctrine officiel de l’Eglise et des vicaires du Christ. Dans les dernières années de sa courte vie Ivan s’occupera des problèmes moraux contemporains. A ce sujet il publiera des articles dans la presse catholique.

       Continuellement, Ivan achetait des livres et des revues,  concernant sa profession et la théologie, se  constituant ainsi une bibliothèque, unique  dans son contenu, représentant environ  1200 ouvrages. Bien que seul un petit nombre de ces livres nous soient parvenu intacte aujourd’hui, il nous reste le catalogue qui témoigne de ce qu’Ivan a possèdé et lu.

Pour conclure, faisons référence au père Vrbanek, guide spirituel d’Ivan qui nous indique que Merz se servait de dix langues et qu’il était qualifié pour quatre professions : professeur, écrivain, officier; il possèdait les connaissances et les vertus nécessaires pour être prêtre !

 

Pilié de l’Eglise Divine

       La qualité la plus significative de la  personnalité d’Ivan, en tant qu’intellectuel catholique, fût son amour et dévouement envers l’Eglise Catholique. Le cardinal Franjo Seper, qui a connu personnellement Ivan, a dit de lui : “L’amour envers l’Eglise, on le sentait  dans chaque parole d’Ivan.” Son ami Douchan Zanko a exprimé l’affection qu’avait Ivan pour l’Eglise :

       “Il n’existait pas d’idée plus forte, dans la personne d’Ivan que l’Eglise; cette Eglise qui à travers la papauté garde la doctrine et l’unité, cette Eglise qui à travers la liturgie prie et offre le “sacrifice de louange” au Père. La papauté  et la liturgie ce sont les ailes de l’âme à Merz; ce sont les caractéristiques essentiels de tout être...Il a porté l’Eglise dans son être si organiquement et si spirituellement qu’il s’en sentait une partie vivante, de la même façon qu’un bras ou une jambe fait partie d’un organisme qui s’appelle l’homme. Toute son âme représentait l’amour pour l’Eglise, l’amour dans l’Eglise. A toutes ces personnes qui venaient chez lui pour entendre et voir quelque chose, même à la façon nicodèmienne, il a demandé – en d’innombrable variantes,  de ce reporter au mystère de l’Eglise.”

       L’Eglise est pour Ivan “la plus grande chose au monde”. Cependant il ne s’agit pas de l’Eglise en général, mais de “l’Eglise Romaine” tant que l’évêque de Rome, successeur de Pierre, mais vicaire du Christ représentant le symbole de l’unité de toute l’Eglise, réside à Rome. Cette dimension “romaine” de l’Eglise, Ivan l’a fera ressentir à d’innombrables occasions, aussi bien par écrit qu’oralement, mais toujours dans le but d’inciter le plus possible de l’amour, de l’enthousiasme et de dévouement envers Celle à qui le peuple croate est le plus redevable dans son histoire.

       Ce que signifiait l’Eglise Romaine pour Ivan, nous nous en rendons compte, le plus, à travers son article intitulé “Pape” (revue “Za vjeru i dom”, 1925) :

       “Lorsque vous vous trouvez à Rome, vous aurez l’impression d’être dans une gigantesque centrale électrique, jamais vu à ce jour, dont les roues tournent sans arrêt et qui émet dans tous  le monde une énergie de grand renouvellement moral. C‘est à Rome que vous aurez l’intuition, le sentiment, que l’Eglise est “perpétum mobile” ou, pour mieux vous dire, qu’une force invisible, continuellement, met en mouvement cette machine géante. Vous aurez l’intuition que tous, dans ce monde, peut dépérir, …mais, la barque papale se balance sans crainte, se balance au milieu des vagues et des foudres, car, elle est ancrée sur l’inébranlable rocher de Pierre.”

       Toutes les encycliques importantes et les documents de l’Eglise de ces 1OO dernières années, Ivan ne les a pas seulement lus mais aussi  bien étudiés. Bien que laïc, Ivan connaissait, mieux que beaucoup de prêtres, la doctrine contemporaine écclésiale! Après sa mort, le dr. Cedomil  Cekada a écrit dans une revue catholique (“Katolicki tjednik”) sur Merz : ”Jamais il ne portait de soutane, mais il était le pillier de l’Eglise Divine!”.

Dans son article “Le renouvellement spirituel selon la liturgie,” Ivan écrit : “Qui est la meilleure institutrice de la vie spirituelle hormis la Sainte Eglise, qui, excepté son expérience de 2OOO ans, agit sous l’influence du Saint-Esprit ? Quelles sont les meilleurs méthodes qu’elle apprend ? Frappons humblement à sa porte en lui demandant qu’elle soit notre guide ou directrice de notre vie spirituelle, demandons lui que notre vie limitée deviennent son associé dans sa vie intérieure et infinie, que notre petite âme s’élargisse jusqu’à l’immensité de la vie divine.”

 

Papauté et sacerdoce

       Si la qualité primordiale de la spiritualité d’Ivan est l’ecclésiasticisme, son sentiment avec l’Eglise,  l’essentiel de cette qualité est ses  rapports avec la papauté. L’idée de papauté revient constamment au cours des six dernières années de sa vie, et cela aussi bien lorsqu’il s’agit de sa vie spirituelle personnelle comme de son apostolat. La papauté a donné la nuance fondamentale à sa personne en tant que laïc catholique mais aussi en tant que travailleur. C’est un fait incontestable –Merz était le premier des laïcs catholiques qui introduisit, auprès du public croate catholique, la conception de l’Eglise et de la Papauté. Il incitat chez de nombreux catholiques l’intérêt d’adoration et de fidélité à l’Eglise et à la Papauté. Il a également suscité la conscience de ce que doit être le Pape en l’Eglise, Pape pour un chrétien, Pape pour le peuple croate.

       D’où vient, chez Merz, un si grand amour envers le pape et l’Eglise ? Il nous le fait découvrir lui-même. Quand on lui demande le pourquoi de son adoration de l’Eglise Catholique et du Saint-Père, il répond : “ Car en Elle (l’Eglise) je vois une image claire du très adoré Sauveur Dieu Jésus avec toutes ses perfections, et au Saint-Père le Pape, dans son aspect d’homme, je vois mon Dieu et mon Seigneur.”  Ces paroles nous font découvrir, justement, la compréhension paulinienne du mystère de l’Eglise ainsi que sa constitution  à la manière  dont le Christ  Seigneur l’a ordonné. L’article le plus beau que Merz écrivit sur  le Pape est “La lettre au frère Aigle”. Cette lettre est destinée aux jeunes afin d’inciter chez eux l’amour et l’estime envers le Vicaire du Christ. Son écrit, Ivan le commence en affirmant “que l’amour et la fidélité au Pape sont essentiels et de la plus grande importance  pour la vie personnelle et publique, temporelle et éternelle, pour chaque croyant.” Plus loin, Ivan insiste sur l’importance de la Papauté dans toute la vie sociale et familiale, la vie dans l’école, dans la presse et dans l’art, dans la vie économique, politique et même, dans les relations inernationales. “De la même manière que le Christ est le centre de toute l’histoire, le Pape l’est aussi. Cependant il est  le Christ visible sur la terre!” – s’exclame Ivan. De cette affirmation Ivan conclut “ Le Pape est cet  inébranlable fondement  sur lequel est construite l’Eglise. Comme l’Eglise renferme toutes les régions du monde, tous les diocèses, ce support papale, mystérieusement, s’étend sur tous les diocèses du monde. Ce support rocheux  demeure inébranlable et toute Eglise élèvée sur cet appui  reçoit sa force et sa ténacité de ce fondement”.

       A la suite, Ivan déclare que la Papauté est également un appui dans notre vie spirituelle: “ L’édifice de notre vie spirituelle, de notre connaissance religieuse et de toutes nos activité doit s’élever sur l’inébranlable fondement des vérités, ce que la Papauté – sans aucune tromperie - nous instruit. La Papauté doit être en même temps la partie essentielle et le support de notre vie spirituelle ainsi que de nos pensées,  notre vouloir et nos sentiments.

       Voilà pourquoi le Pape doit être l’objet de notre respect particulier et de notre amour –il doir être une partie de la vie de notre âme”.

       Dusan Zanko, l’ami d’Ivan, nous décrit ainsi l’amour qu’Ivan témoignait evers la Papauté: “Aujourd’hui je peux le dire, en toute conscience, que ça a été, pour moi, un vrai miracle de contempler durant quatres années ce jeune professeur, qui, sans aucune exagération, trouvait en l’ étude des encycliques sa première et principale préoccupation. Encycliques, les encycliques ! Elles voletaient  autour de nos oreilles, comme des hirondelles.  De ces vases magiques  romain, nous n’en avons attrapé que quelques gouttes sans pour cela en atteindre leurs douceurs  et leurs valeurs. Et lui, il puisait, seulement puisait, infatiguablement, jours et nuit, il puisait fleurissant de bonheur, sachant que les puits sont inépuisables, très riches, et, qu’avec eux, tout le monde peut s’y rafraichir, tout l’univers y renaître.”

       Dans une de ses conférence, Ivan dit :”…Si nous souhaitons vraiment contribuer au salut de la société contemporaine, nous devons diriger nos yeux uniqument vers l’infaillible maître de la vérité et de la morale, vers le Saint-Père mais aussi, vers ceux auquels le Saint Esprit a confié la direction de l’Eglise Divine.”

       Comme l’amour et le respect, pour Ivan,  commençait par le Pape, elle se  propageait tout logiquement  sur tous les porteurs du sacerdose : les évêques et les prêtres.

       Outre sa grande estime et profond respect envers la dignité de la classe sacerdotale, Ivan a taché, par son travail et son engagement, d’aider les prêtres afin qu’ils puissent exercer seulement leur mission spirituelle reçue du Christ.

       A de tels prêtres Ivan était l’ami, à d’ autres il était le proche, pour beaucoup il était un modèle. L’un d’eux ecrit : ”Pour moi il n’était pas seulement un ami, je le considérais aussi  comme  mon guide spirituel.”

       Citons pour conclure ce chapitre, un excellent article intitulé “Le prêtre en civil” dont son auteur nous expose tout ce que Merz a fait pour le sacerdose. “Son action avait une influence directe sur notre sacerdose. En premier lieu, il faut nous rappeler toutes ses nombreuses vocations nées de l’incitation qu’Ivan a inspiré dans nos organisations de  jeunesse, puis se remémorer son comportement personnel, exemple qui attirait de manière irrésistible nos jeunes en les dirigeant vers des cibles plus hautes, les amenant ainsi jusqu’à la vocation sacerdotale. N’y a-t-il pas mainte prétre qui ont connu le dr.Merz, personnellement ou à travers sa biographie, qui n’ont resenti une grande impulsion pour vivre un idéal sacerdotale plus fort…Il (Ivan Merz) fût et restera un grand idéal pour les laïcs, mais son apparition et son œuvre auront signifié également pour les prêtres un soulèvement de vrai compréhension de leur profession sacerdotale.”